Dispense pour mariage (suite et fin)

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† graffit
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Dispense pour mariage (suite et fin)

Messagepar † graffit » 09 avr. 2012 15:42

Et voici la dernière page
Dispense Desvignes-Taisne 4.jpg
Merci d'avance

=;
Vous n’avez pas les permissions nécessaires pour voir les fichiers joints à ce message.
Amicalement Graffit :D

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VERDIER Ch.
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Re: Dispense pour mariage (suite et fin)

Messagepar VERDIER Ch. » 19 avr. 2012 18:41

Bonjour,

Les autres photos sont ici :

http://geneachtimi.com/viewtopic.php?f= ... 86#p214086
------------ -----


J'ai attendu ( en vain :( !) l'arrivée de nouvelles photos plus faciles à lire.

J'ai fait ce que j'ai pu pour lire les présentes, mais bien des passages sont difficiles à lire, voire impossibles (surtout la 4ème page)


----------------- -----------------------------------------------------

LE TEXTE LATIN

page 1

[-- ?] virum paris conditionis
cui nubere possit [e---?]

informanda pro execu(ti)o(n)e l(itte)rarum dispensationis
ap(osto)licae et (= de ?)* futuro matrimonio inter Georgium De
Vigne de Haspre dioc(esis) cameracen(sis) et Annam Taisnes
de Fenin dioc(esis) Atrebaten(sis) respective incolas nobis
Officiali cameracen(si) (sede episcopali atrebaten(si) vancan(te) )
tanquam ordinario seu Officiali viciniori directarum


*et : sans doute erreur pour de

Primo quod p(raedic)ti Georgius De Vigne, et Anna Taisnes
sint tertio consanguinitatis gradu invicem conjuncti,
et non proximiori, nec aliud sit inter eos canonicum
impedimentum

(marge du primo )
per testes juratos et
partium juramentum
qui respective suas
dispo(sitio)nes signabunt
et insuper (signantes
testes) rationem scientiae
assignabunt.



Secundo quod ipi (=ipse ?), videlicet Georgius ex loco de
Haspres, ipsa vero Anna de Denain sint orti


(marge du secundo )

per testes et extractum
registri baptismalis
.

Tertio quod d(ic)ta Anna in loco de Fenain atrebaten(sis)
dioc(esis) a triennio et ultra commoratur.


(marge du tertio)
per testes
ipsiusque
juramentum


Quarto quod eadem Annam in omnibus p(redic)tis locis
videlicet de Haspres, Denain, de Fenin etiam de
uno ad alium se transferendo, propter illorum angustiam,
virum paris conditionis , cui nubere possit, invenire
nequeat.

( marge du quarto)
per testes juratos
et dictae Annae
juramentum, quod
videlicet virum paris
conditionis in locis in
ar(ticu)lo designatis, cui
nubere po(ss)et non invenerit
nec inveniat



---------- -----------
page 2

Quinto quod d(ic)ta Anna propter hoc rapta non
fuerit, nec alias coacta, eiusque parentes in hoc
matrimonium consentiant

(marge du quinto)
per declara(ti)o(n)em ac
juramentum ipsius
Annae et parentum


Sexto Fiant proclama(ti)o(n)es canonicae in paro(chia)libus
ecclesiis originis dictorum Georgii et Annae et docebunt
partes de[ hmoi ? ]* proclamationibus per rela(ti)o(n)em parochorum
respective locorum de Haspres et de Denain, antequam
decretum nostrum interponamus super praetensa dispensa(ti)o(n)e


*hmoi ? : mot abrégé non décodé.

(marge du sexto )
factae fuerunt tres
proclamationes non
solum in Haspres et
Denain sed et in Fenain
ut constitit et constat
per exhibitiones seu
attestationes pastorum
eorumdem respective
locorum


Committimus et deputamus d(omi)num pastorem
supradicti loci de Haspres, seu dominum pastorem de Saulzoir
et eorum quemlibet ad de praemissis omnibus et singulis
(diligenter)*

(en bas à gauche)
Bulla est de Idibus Junii 1638 ( = la bulle est des ides* de juin 1638) *ides de juin = 13 juin
dispensatum 23 angusti 1638 ( = la dispense a été accordée le 23 août 1638 )

*diligenter : pour mieux assurer la suite des pages, on inscrivait en fin de chaque page le 1er mot de la page suivante.

---- ----------- -

p.3

diligenter informa(ndu)m? informa(ti)o(n)em que ad [nos/vos ?]
quantocius una cum presenti [ethicqueto?] arboreque
consang(uini)tatis debite attestata, signata et jurata
(designato in singulis gradibus utroque coniuge)
transmitte(nda)m? . Actum et datum Cameraci anno
domini 1638 mensis julii die vigesima octava
Per reverendum dominum officialem
Cameracen(sem) p(raedic)tum


Notet autem pl(urim)us d(omin)us Co(mm)issarius quod clausula hic supra
ar(ticu)lo 4° relata, videlicet quod dicta Anna Taisne virum
sibi parem seu paris conditionis in dictis locis de Haspres de
Denain et Fenain, cui nubere possit invenire nequeat [ettha? ]
non possit commode verificari, nisi per diligentiam aliquam
desuper hoc est ad virum sibi parem seu paris conditionis inveni[endum?]
[dum? prestitam?] (non quidem in locis circumvicinis ) sed saltem in
ipsis locis seu pagis Haspres, Denain et Fenain etiam de
uno ad alium ad eundem effectum se transferendo, ut alias
respondit S(acra) Congregatio in similibus. Vel ut inquit Sanchez*
De matrimonio lib. 8. dispu. 19 nu. 14 probari debet co(mmun)iter non reperiri
in dictis locis seu pagis viros pares qui non sint dictae Annae
consanguinitate vel affinitate aut cognatione spirituali iuncti
vel quod maior pars sibi parium in iisdem locis sint ei consanguinei
vel affines intra quartum gradum, vel cognatione spirituali
iuncti. Juvaret etiam plurimum si ipsa cum veritate iurare
posset, quod ab eo quo vir eius mortuus est (et designet tempus
viduitatis suae) a nullo fuerit in matrimonium requisitata, et adhuc
modo ab ullo requiratur praeterquam a dicto Georgio de Vigne.
sciat insuper co(mm)issarius quod dicta clausula virum paris
conditionis [e-?] debet vera exstitisse et existere duobus temporibus.
(videlicet)


*Sanchez : Tomas Sanchez, jésuite espagnol ( décédé en 1610) auteur d’un ouvrage sur le mariage (De Sancto Matrimonii Sacramento) qui a fait autorité à l’époque.

page 4 ----- ------------- ------------------

(toute une zone difficile à lire)

videlicet tempore gratiae seu bullae Romae concessae et
tempore decreti reverendissimi domini Officiali cameracensis / - ?- / interponendi
Sciat etiam et notet Co(mm)issarius huiusmodi conditionis paritatem
non consistere in solis divitiis, sed etiam /- ?-/ vel et? maxime in qualit[ate?]
seu honestate familiae X probitate /------ bilitate ---- ?--? / manuum ingenio, arte et industria
{interligne début illisible } --- habent vel sit
{rayé ---------------------------------} ingenii et
--- ? ex qua ? ------------- paritas vel disparitas --- ? possit
{X renvoi dans la marge illisible }


Notet etiam Co(mm)issarius quod in informatione per eum habita
28 julii 1638 in depositione testium super 3° ar(ticu)lo ethiqueti?
non satis clare exprimatur a quo tempore dicta Anna Taisne
habitaverit in Fenain ita ut dubitari possit an testes loquantur
de anno 1638 an 1628 propter correctionem aut imperfectionem
caracteris, quare exprimatur hoc clarius ut nullus restet
scrupulus.



---------------------- --------------------------------------------

TRADUCTION


Page 1

[-?] un homme de condition égale qu’elle puisse épouser [--- ?]

Informations (= enquête) à effectuer pour l’exécution des lettres de dispense apostolique concernant et ( =pour ?) le futur mariage entre Georges Devigne de Haspres du diocèse de Cambrai , et Anne Taisnes de Fenain du diocèse d’Arras habitants respectifs de ces lieux, adressées à Nous Official de Cambrai (le siège épiscopal d’Arras étant vacant) en tant qu’Ordinaire ou Official du voisinage le plus proche.

Premièrement : que les susdits Georges Devigne et Anne Taisnes sont reliés l’un à l’autre par un troisième degré de consanguinité, et non un degré plus proche, et qu’il n’y a pas entre eux d’autre empêchement canonique
(marge)
par les témoins sous serment et le serment des parties qui respectivement signeront leurs dépositions et en outre (les témoins qui signent) donneront assigneront ? la raison de cette connaissance.

Deuxièmement : qu’il sont originaires, lui, à savoir Georges, du lieu de Haspres , et elle, Anne, de Denain.
(marge)
par les témoins et l’extrait du registre de baptême.

Troisièmement : que la dite Anne réside dans le lieu de Fenain du diocèse d’Arras depuis trois ans et plus.
(marge)
par les témoins et serment de celle-ci.

Quatrièmement : que cette même Anne dans tous les lieux susdits, à savoir Haspres, Denain, Fenain, même en se rendant de l’un à l’autre, à cause de leur étroitesse ne peut trouver un homme de condition égale qu’elle puisse épouser.
(marge)
par les témoins jurés et le serment de la dite Anne( disant) qu’elle n’a pas trouvé et ne trouve pas dans les lieux indiqués dans l’article un homme d’égale condition qu’elle puisse épouser.

page 2

Cinquièmement : que la dite Anne n’a pas été pour cela enlevée ni autrement ?contrainte, et que ses parents consentent à ce mariage.

(marge du quinto)
par la déclaration et le serment d’Anne elle-même et des parents.


Sixièmement : que soient effectuées les proclamations canoniques dans les paroisses d’origine desdits Georges et Anne, et les parties informeront de [---- ?] proclamations par le rapport des curés respectifs de Haspres et de Denain, avant que nous ne procédions à notre décret concernant la dispense attendue.

(marge du sexto)
ont été effectuées les trois proclamations non seulement à Haspres et Denain mais aussi à Fenain comme cela a été et est certifié par les documents, c’est à dire les attestations des curés respectifs de ces mêmes lieux.

Nous commettons et députons le sieur curé du lieu susdit de Haspres, ou bien le sieur curé Saulzoir
et n’importe lequel d’entre eux pour qu’ils procèdent avec diligence à l’information concernant tous et chacun des points en question et qu’il nous/vous ? la transmette au plus vite avec la présente [notice?] et l’arbre de consanguinité, dûment attestés, signés et certifiés par serment ( chacun des 2 époux étant signalé dans chaque degré) . Fait et donné à Cambrai l’an du Seigneur 1638 le vingt-huitième jour du mois de juillet par le susdit révérend sieur Official de Cambrai.


Que le très révérend Sieur commissaire prenne note que la clause portée ci-dessus à l’article 4, à savoir que ladite Anne Taisnes ne peut [--] trouver dans les lieux susdits de Haspres, Denain et Fenain un homme qu’elle puisse épouser, ne peut commodément être vérifiée, si ce n’est avec quelque diligence. En outre [cela implique que] pour trouver un mari qui lui soit égal ou d’égale condition [elle doit chercher] non certes dans les lieux circonvoisins, mais du moins dans ces lieux-mêmes à savoir les villages de Haspres, Denain et Fenain, en se transportant aussi de l’un à l’autre dans ce même but, comme de par ailleurs l’a répondu la Sacré Congrégation dans des cas similaires. Ou bien comme le dit Sanchez dans son livre « Du mariage » livre 8, question 19, n° 14 , il faut habituellement prouver que ne peuvent être trouvés dans ces lieux ou villages des hommes de condition égale qui ne sont pas unis à ladite Anne par la consanguinité ou l’affinité ou la parenté spirituelle, ou bien que la plus grande partie des hommes de condition égale présents dans ces mêmes lieux sont ses consanguins ou ses affins à l’intérieur du 4ème degré, ou bien lui sont unis par parenté spirituelle. Ce qui aussi serait d’un grand secours c’est qu’elle-même puisse jurer avec vérité que depuis que son mari est décédé ( et il faut qu’elle indique l’époque de son veuvage) elle n’a jamais été demandée en mariage et qu’à ce jour elle n’est en aucune façon demandée, excepté par ledit Georges Devigne.
Que le commissaire sache en outre que ladite clause concernant l’homme de condition égale doit avoir été et être vraie aux deux moments, à savoir au moment de l’obtention de la grâce, c’est-à-dire la bulle de Rome, et au moment de la promulgation du décret du révérendissime Official de Cambrai.
Que le Commissaire aussi sache et note que l’égalité d’une telle condition ne consiste pas seulement dans les richesses, mais aussi[-----]et surtout dans la qualité, c’est à dire l’honorabilité de la famille, la probité, l’habileté des mains, l’art et l’industrie [---------] {sens difficile à tirer du reste des bribes lues de ce passage}

Que le commissaire prenne note aussi que dans l’enquête menée par lui le 28 juillet 1638 dans la déposition des témoins concernant le 3ème article de [l’étiquette ?] il n’est pas suffisamment clairement exprimé depuis quelle époque la dite Anne Taisnes a habité à Fenain en sorte qu’il est possible de douter si les témoins parlent de l’année 1638 ou 1628 en raison de l’exactitude ou de l’imperfection du signe écrit ; c’est pourquoi il faut que ce soit exprimé clairement pour qu’il ne subsiste aucun scrupule.

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QUELQUES COMMENTAIRES




Ce document nous place au cœur même de la procédure suivie par le tribunal ecclésiastique pour accorder une dispense de consanguinité.

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Bref rappel des étapes successives de cette procédure :

1)-Un dossier de demande de dispense est monté par le curé de la paroisse, qui établit une arbre généalogique montrant qu’il y a un degré de consanguinité/affinité égal ou inférieur au 4ème degré, et qui surtout expose le motif de la demande de dispense. Plusieurs motifs admissibles sont possibles (voir plus bas)
2)- Ce dossier est expédié selon le cas à Rome ou a l’évêché. S’il est envoyé à Rome, le Saint Siège l’examine et s’il semble probant, accorde la dispense par une bulle papale expédiée à l’évêque concerné, avec pour mission de procéder, par une enquête minutieuse, à toutes les vérifications nécessaires. On passe alors à l’étape suivante.
Si la demande est adressée directement à l’évêque, on passe aussi l’étape suivante.
3)-l’évêque confie le dossier à l’Official (=juge du tribunal ecclésiastique), lequel confie au Promoteur (= juge d’instruction) le soin de procéder à une enquête minutieuse pour vérifier l’exactitude et la sincérité de tous les points du dossier : réalité de la consanguinité, validité du motif de la demande, sincérité du dossier dans son ensemble.
Pour cela il aura recours à tous les documents écrits qu’il jugera utiles et probants, et à tous les témoignages nécessaires, ces témoignages pouvant se faire sous serment ( témoignages des parties, des parents, des amis, des voisins, etc..)
Les témoins pourront être convoqués à l’évêché, mais pour des raisons de simple commodité il est aussi possible de les interroger sur place (les parties et les témoins habitaient parfois loin de l’évêché).


Si la dispense a été accordée par une bulle papale, et si la demande de dispense s’avère parfaitement justifiée, l’évêque procède alors à la « fulmination » de cette bulle. La fulmination consiste à rendre effective la dispense accordée par le Pape. Bien sûr, si cette enquête démontre que la demande est injustifiée et/ou non sincère, l’évêque ne procéder pas à la fulmination, et la dispense accordée par le Pape devient caduque.

Le présent document concerne l’étape de l’enquête.
----------- -------
Pour bien comprendre, il faut absolument avoir en tête le motif de la présente demande de dispense, à savoir l’angustia loci (petitesse du lieu) si une seule paroisse était concernés, et l’angustia locorum (= la petitesse des lieux) si cela concernait plusieurs paroisses (c’est le cas ici) .
Lorsque la femme habitait une paroisse de faible population (à l’époque on parlait habituellement de « petitesse du lieu» lorsque la paroisse avait moins de 300 feux – mais ce chiffre pouvait être discuté), du fait qu’on ne voyageait pas beaucoup à l’époque, on estimait très vraisemblable qu’elle n’ y puisse facilement trouver un mari qui ne soit ni son consanguin , ni son affin, et qui soit aussi de condition égale.
Si donc une femme, qui n’avait jamais été auparavant demandée en mariage par un « étranger » (=quelqu’un qui ne soit ni son consanguin ni son affin), passé l’âge de 24 ans (âge régulièrement admis par l’Eglise), était demandée en mariage par un de ses parents, l’Eglise estimait que c’était peut-être là sa dernière chance de se marier, et lui accordait donc facilement la dispense.

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La page 1 et début de la page 2 contiennent 5 points essentiels à vérifier :

1-l’exactitude du degré de consanguinité (4ème), assortie d’ une précision capitale : ce ne doit pas être un degré inférieur (le texte latin dit : et non plus proche : proximiori). Si le degré est supérieur au 4ème, il n’est plus besoin de dispense ; s’il est inférieur, la demande n’est pas sincère, et cela pose alors un tout autre problème. La présente demande pourrait ne plus être recevable.

En marge est indiqué que les témoins et les paries, sous serment, ont certifié de l’exactitude de ce degré de consanguinité, mais il est précisé que ces témoignages oraux devront être mis par écrit et signés.
2)- exactitude du lieu de naissance et /ou de résidence des deux parties. Point important à vérifier, puisque le motif de demande de dispense repose sur la « petitesse des lieux ». Toute fausse déclaration, qu’elle soit volontaire ou involontaire, entrainerait la nullité de la demande.
La note marginale indique que les témoins ont certifié l’exactitude des faits, le tout confirmé par un extrait d’acte de baptême. Ce point est donc parfaitement établi.

3)-la durée de résidence d’ Anne à Fenain au moins égale à 3 ans ? S’il s’avère que cette durée est inférieure, le tribunal ecclésiastique pourrait objecter que c’est une durée insuffisante. Il demanderait alors de renvoyer à plus tard une telle demande de dispense. Avec le temps qui passe un prétendant, autre qu’un consanguin, pourrait bien se déclarer.
La note marginale indique que les témoins l’ont certifié, ainsi que l’intéressée sous serment.
A noter aussi qu’en page 4 est précisé qu’il faudra faire préciser par les témoins la date d’installation de Anne à Fenain, cette date étant mal écrite (si du moins j’ai bien compris le texte – sens du mot caracter ?). Il y a 10 ans d’écart entre 1638 et 1628 . Selon ce qu’on lit, cela change tout pour l’appréciation du dossier !

4)-Est-il bien exact que l’argument de l’ « angustia locorum » (petitesse des lieux) peut être ici invoqué pour justifier l’impossibilité de trouver un homme de condition égale ? On a affaire à trois paroisses (Haspres, Denain et Fenain ), et Anne peut aller de l’une à l’autre. Ce point mérite donc d’être bien vérifié étant donné que le total de la population en cause est assez important ! Il se peut donc que l’argument de « la petitesse des lieux » ne soit pas recevable.
Il faut ici noter qu’il est très difficile de faire la preuve de quoi que ce soit, tant l’appréciation des choses est d’ordre subjectif, en particulier ce qu’on appelle « la condition égale » (par conditio).
La note marginale indique que sous serment les témoins et l’intéressée ont assuré qu’il en était ainsi. Mais voir le texte de la page 4 où sont détaillés, sinon quelques doutes, du moins quelques vérifications supplémentaires à effectuer (la notion de « condition égale » peut être peut être conçue de manière étroite ou large. La conclusion de l’enqête peut en être modifiée.

5)- Vérifier que la femme n’a été ni enlevée ni contrainte, et que les parents consentent à ce mariage. A l’époque l’Eglise exigeait que ces points soient satisfaits. Un mariage n’était canoniquement valide que si les parties y consentaient librement. Si l’enquête du Promoteur démontre qu’ Anne a été enlevée ou contrainte, le mariage n’est plus possible.
L’accord des parents était uniquement exigé par le pouvoir civil, et l’Eglise devait s’en assurer. Cependant, dans le cas où le mariage aurait malgré tout été célébré sans cet accord, cette absence n’invalidait pas le mariage en tant que sacrement, mais empêchait ses effets civils (par exemple, les enfants n’avaient pas le droit d’hériter)

Sous serment, Anne et ses parents, ont confirmé ces 2 points (note marginale). Le tribunal ne peut donc en douter.

6)-Il est demandé qu’une première proclamation des bans soit effectuée avant que ne soit définitivement promulguée la dispense, et les curés concernés devront en attester par écrit.
En effet, à ce stade de l’enquête, le futur mariage n’a pas encore publié. L’Eglise exigeait presque toujours (sauf sauf s’il y avait risque de scandale) qu’il soit rendu public avant la promulgation de la dispense, pour que d’une part puisse être révélé un quelconque élément (déclaration inexacte, etc.) resté dissimulé à l’enquêteur, que d’autre part puisse être dénoncé un autre empêchement ne figurant pas dans le dossier.

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Fin de la page 2 et début page 3.

L’Official confie au curé le soin de procéder au plus vite à la vérification des 6 points précédents et de lui faire part en retour du résultat. C’est ce résultat qui est indiqué dans les notes marginales à gauche de chaque point.
Rem : ces notes ne sont-elles qu’un résumé et existait-il un document plus complet, plus explicite ? Je ne saurais le dire !

Fin de la page 3 et page 4.

Remarques préalables :

- On estimait à l’époque que la femme ne devait pas « prendre les devants » pour trouver un mari. Elle devait attendre qu’un homme la demande en mariage. Tel était l’usage et cela était contenu dans un adage latin : non enim est virginalis pudoris eligere ; non minus quaeritare maritum = il n’appartient pas à la pudeur de la jeune fille de choisir, encore moins de rechercher un mari.
Il faut bien avoir ce point en tête, pour comprendre l’angle sous lequel est présentée la difficulté voire l’impossibilité de trouver un mari. On ne reproche jamais à une femme de ne pas s’être montrée « active » dans la recherche d’un mari, et le tribunal ne lui demandera jamais si elle, de son côté, a demandé un homme en mariage. On se contente simplement de constater qu’aucun homme ne s’est déclaré. Bien évidemment, rien n‘empêche la femme de jouer le jeu de la séduction, mais au final il doit toujours y avoir une demande en mariage effectuée par l’homme..

- Ne connaissant pas tous les aspects du dossier, je suis obligé de procéder parfois à des déductions (raisonnables ) à partir de ce que dit et implique le texte. On ignore en particulier en quoi la paroisse de Denain est concernée. Lieu de résidence d’Anne ? Il serait pourtant bien utile de tout savoir à ce sujet, puisque la cause invoquée est la « petitesses des lieux ».
------- -------------
Cette fin de page 4 contient des recommandations particulières supplémentaires pour bien effectuer l’enquête (elles sont écrites d’une autre main).

En premier y est abordé le problème de la « petitesse des lieux ». Etant donné qu' il est assez facile de l’invoquer cette notion assez vague et imprécise, L’enquêteur devra donc bien s’assurer qu' Anne n’y a pas recours abusivement.

Cet argument contient en fait 2 facettes légèrement différentes :

a)- la petitesse du lieu est telle qu’il est impossible de trouver mari qui ne soit un parent (consanguin ou affin) et qui en outre soit de même condition.
Si tel est le cas (mais il faudra vérifier !), la dispense peut être accordée sans difficulté.
Dans le cas présent, si l’argument de la « petitesse du lieu » circonscrit à Fenain ou Denain est recevable, en est-il de même si on l’ élargit au 3 paroisses? Quel était le total de la population de ces 3 paroisses ? Et puisque Anne passait de l’une à l’autre (etiam de uno ad alium ad eumdem effectum se transferendo), dit-elle vrai en prétendant qu’elle ne pouvait trouver sur l’étendue de ces 3 paroisses aucun homme qu’elle puisse épouser ?

b)- Il existe peut-être des maris possibles de même condition et qui ne sont pas des parents, mais dans les faits aucun à ce jour ne s’est déclaré. Seul un parent l’a demandée en mariage.
Cet argument est de nature différente du précédent, et l’Eglise ne l’accepte que lorsqu’ un certain temps s’est écoulé. Une jeune fille doit avoir passé l’âge de 24 ans, et une veuve doit être veuve depuis plusieurs années, d‘où la demande de vérification de la date du veuvage (« et il faut qu’elle indique l’époque de son veuvage » ) . Il faut noter à ce propos l’invitation à faire préciser aux témoins une date qui n’a pas été notée correctement et que sa lecture est incertaine.

Bien évidemment il est difficile de faire la preuve que l’argument de la « petitesse des lieux » est dans tel ou tel cas sincère. Comment une femme peut-elle prouver que nul homme dans la paroisse ne l’a encore demandée en mariage? C’est pourquoi l’enquêteur doit pousser le plus loin possible ses investigations, mais au final il n’a bien souvent à sa disposition que la parole de l’intéressée et des témoins, et leur déposition sous serment.

A cela s’ajoute une condition qui accompagne naturellement l’argument de « la petitesse du lieu » : l’homme doit être d’une condition égale (paris conditionis). Ce point est délicat, car il relève d’une appréciation en grande partie subjective. De ce fait une femme peut être amenée à l’invoquer fallacieusement pour refuser un prétendant dont elle ne veut pas pour mari, et ce pour un motif qu'elle ne veut dire.
La disparité des conditions est cause de mésalliance et l’Eglise n’en ignorait pas les conséquences néfastes pour un mariage paisible ; c’est pourquoi elle y était très attentive. Encore faut-il qu’on s’accorde sur le contenu exact de cette notion. Spontanément on pense à l’égalité de fortune. Mais le dernier texte de la page 4 rappelle que cette notion ne se limite pas à la fortune, et qu’elle doit être étendue aux qualités morales. Autrement dit, une certaine disparité de fortune peut être compensée par une égalité des qualités morales.
Par conséquent il faudra examiner attentivement en quel sens l’entendait Anne lors de sa demande de dispense. S’il est avéré qu’elle ne pensait qu’à la seule et unique égalité de fortune, le tribunal pourrait le lui reprocher au motif qu’elle a d’elle-même restreint le champ du possible, et sa demande ne pourrait plus être considérée comme totalement recevable, avec obligation de renvoyer à une date ultérieure cette demande de dispense..

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Voilà donc un exemple d’enquête effectuée par l’Eglise préalablement à toute décision pour accorder ou non une dispense de consanguinité.
On peut noter qu’Elle ne prenait pas ces affaires-là à la légère. Ces dispense n’étaient pas accordées à la sauvette, signée à la va-vite sur un coin de table, après un survol rapide du dossier. Une véritable enquête était effectuée, certes avec les moyens de l’époque, mais toujours avec la plus grand sérieux et la plus grande diligence.
L’Eglise n’était pas opposée par principe aux dispenses de ce type, et elle les accordait même très facilement car elle ne souhaitait pas qu’une femme reste dans le célibat à cause des rigueurs de la loi canonique.
Mais elle ne voulait pas pour autant les accorder sans motif et elle acceptait qu’une femme se marie avec un de ses parents, mais à la seule condition que la preuve soit faite qu’elle ne pouvait pas faire autrement sous peine de rester à jamais célibataire, état auquel elle ne se sentait pas nécessairement appelée.

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P . S. Il existait environ un dizaine de raisons acceptables par l’Eglise pour accorder une dispense de consanguinité/affinité. La « petitesse du lieu » est la plus fréquemment avancée. J’aurai sans doute un jour l’occasion de les exposer toutes.


Christian

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Re: Dispense pour mariage (suite et fin)

Messagepar † graffit » 19 avr. 2012 19:13

Bonjour Christian,

J'ai eu une panne de freebox et privé de connexion pendant plusieurs jours.Je vous prie donc de m'excuser pour le retard.Je n'ai donc trouvé qu'aujourd'hui les photos que mon amie a refait et j'ai commencé à les découper pour les mettre sur le site sans les compresser.Je suis très contrariée que vous ayez effectué cette traduction sans attendre puisque je vous avis dit que je vous tiendrais au courant.
Je vous remercie infiniment pour le travail que vous avez effectué et pour toutes les précisions que vous donnez.
Anne Taisne était censière de la grande cense de Fenain.Je suppose qu'il lui fallait épouser un homme capable de gèrer la cense.
Je joints dans ce message et dans les suivants les nouvelles photos.
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Re: Dispense pour mariage (suite et fin)

Messagepar † graffit » 19 avr. 2012 19:15

Suite
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Re: Dispense pour mariage (suite et fin)

Messagepar † graffit » 19 avr. 2012 19:17

Suite
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Re: Dispense pour mariage (suite et fin)

Messagepar † graffit » 19 avr. 2012 19:19

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Re: Dispense pour mariage (suite et fin)

Messagepar † graffit » 19 avr. 2012 19:49

2ème page
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Re: Dispense pour mariage (suite et fin)

Messagepar † graffit » 19 avr. 2012 19:51

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Re: Dispense pour mariage (suite et fin)

Messagepar † graffit » 19 avr. 2012 20:18

3ème page
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Re: Dispense pour mariage (suite et fin)

Messagepar † graffit » 19 avr. 2012 20:19

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